9 ème Etape : Fuente Roble-San Pedro de Rozado 30 Km
Aujourd’hui nous allons rallier San Pedro de Rozado. Mais 30 kilomètres, sans village nous séparent de notre objectif. Le sac à dos sera plus lourd : 2,5 litres d’eau sont nécessaires.
Nous partons à 6h30, le vent souffle, il fait froid.
Je découvre avec un certain étonnement que mes compagnons canadiens sont équipés de gants.
Je les aurais certainement taquinés au départ de Séville, par une température de 38 degrés, si j’avais su le contenu de leur sac. Mais à présent leur prévoyance est récompensée.
Le paysage est somptueux ce matin. Tous nos compères de la veille nous dépassent d’un pas alerte. Je les regarde s’éloigner rapidement et j’apprécie mon pas mesuré.
Je suis en harmonie. Mon corps se sent bien, je suis heureuse tout simplement.
Nous montons sur le Pico Duenas. Une croix de bois est plantée dans un endroit paisible avec une vue panoramique sur la plaine. Paix et sérénité enveloppent ce lieu. Rejeanne et Bob le choisissent afin de commémorer la mémoire de leurs proches disparus.
Nous partageons ce moment émouvant.
Ils évoquent pour moi la mémoire du père de Bob qui chérissait la notion d’amitié et aurait été ravi de célébrer une nouvelle amitié.
Ainsi que elle de sa sœur qui aurait tellement aimé marcher sur le Camino.
Une émotion profonde nous traverse : joie tintée de tristesse.
Rejeanne et Bob les portent dans leur cœur, ils les accompagnent sur le Camino.
Ils me parlent aussi de leurs enfants qui vont aimer le lieu qu’ils ont trouvé pour déposer les pierres de leurs proches. C’est un hommage magnifique rendu à ceux que l’on continue d’aimer, accompagné d’une pensée pour tous ceux que l’on aime.
Sur le Camino, comme dans la vie nous portons dans notre cœur ceux que nous aimons, la distance n’existe pas.
Au sommet du Pico les « molinos » (éoliennes) tournent.
Bob calcule la vitesse des hélices, juste au-dessous du mur du son !
Nous sommes au point central entre Séville et Santiago. Mes amis ont parcouru la moitié du chemin.
L’ombre d’un arbre nous permet de nous assoir, la température est sévèrement remontée.
Le pique nique me semble succulent, je suis affamée.
Les olives, le saucisson, le pain sont délicieux.
Sur le Camino, la saveur des aliments retrouve son essence.
Quand nous avons faim les papilles retrouvent toute leur fonctionnalité et notre cerveau apprécie pleinement la satisfaction de l’estomac qui se remplit.
La descente me demande plus de concentration, les bâtons sont une aide précieuse.
Dans le sous-bois les feuilles des arbres jouent avec la lumière, des senteurs de sève se dégagent. Nous rejoignons une route. Sur le macadam, la chaleur devient écrasante.
Le couple d’allemand croisé hier soir se repose en plein soleil. Lui souffre des genoux.
Les kilomètres sont de plus en plus longs. L’ombre d’un marronnier géant nous appelle. Le temps de s’asseoir et Bob s’endort sans avoir enlevé son sac à dos. J’installe le matelas que je partage avec Rejeanne et face à un paysage noyé de soleil nous nous endormons.
La sieste nous redonne de nouvelles forces vives
.
L’alternance de tarmac et de chemins de terre, sollicite les genoux qui commencent à faire sentir leur existence. De plus ma réserve d’eau est presque à sec. Ma bouche s’assèche et j’espère voir bientôt apparaître notre havre de repos. Une colline, une autre colline et enfin San Pedro de Rozados apparaît.
Le couple d’allemand est arrêté en bord du chemin. Nous proposons notre aide pour les soulager d’un sac. Mais ils n’acceptent pas. Nous entamons la descente. 500 mètres plus loin, Bob décide de lui prêter ses bâtons, ils remontent à leur rencontre. Nous sommes tous les trois fatigués et las de notre journée, mais Bob est troublé. Il souhaite soulager la douleur de cet autre pèlerin, lui apporter son soutien. C’est Bob, la générosité de Bob !
Je suis fière de compter parmi mes amis un tel être humain.
Dans le village, un banc ombragé nous propose une halte salutaire. Bob nous ayant rejoint nous allons directement au bar pour récupérer les clés de notre casa rural.
Une jolie petite maison nous attend avec un patio ombragé. Deux chambres, une salle de bain, une cuisine rien que pour nous !
Nous retournons sur nos pas prendre une bière. En quête du « supermercado » (supermarché), nous faisons deux fois le tour du village.
Ce soir nous aurons un festin ! Après plusieurs allers-retours pour ouvrir la bouteille de vin et les boites de conserve, Rejeanne nous concocte un menu de choix. Nous échangeons le programme des futures étapes et dégustons la cuisine de Rejeanne.
C’est une communion dans la plénitude du moment partagé.
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